3 questions à Ingrid Verduyckt, PhD, professeure adjointe à l’École d’orthophonie et d’audiologie
Le saviez-vous? La majorité des personnes qui vivent avec la maladie de Parkinson présentent des troubles du langage : la voix peut devenir rauque ou tremblotante, l’articulation moins précise, le débit modifié…
En ce 16 avril, journée internationale de la voix, nous donnons la parole à Mme Ingrid Verduyckt, PhD, professeure adjointe à l’École d’orthophonie et d’audiologie à l’Université de Montréal. Cette passionnée de la voix nous livre un témoignage fort et optimiste, invitant les personnes vivant avec la maladie de Parkinson à faire entendre leur voix.

Et n’oubliez pas, en avril, vous pouvez faire la différence grâce au don de tulipes virtuelles. C’est simple, rendez-vous sur rendez-vous sur CanaDon.org et sélectionnez l’onglet « Tulipes virtuelles » sous l’onglet « Assignez votre don à un des fonds créés par cet organisme ».
Pour commencer, pourriez-vous rapidement vous présenter?
Ingrid : je suis belge d’origine et j’ai vécu longuement en Suède. C’est là que j’ai initié des études en orthophonie, par passion pour la voix. J’ai ensuite exercé en tant qu’orthophoniste en Suède puis en Belgique, auprès de personnes qui ont des difficultés avec leur voix. Depuis 2014, je ne suis plus orthophoniste, mais je suis professeure et chercheure à l’École d’orthophonie et d’audiologie de l’Université de Montréal. Je suis passionnée par la diversité des voix, et leur unicité. Nous avons tous une empreinte vocale qui nous est propre et qui fonctionne un peu comme notre visage sonore. Notre voix est intimement liée à notre personnalité, et cela est fascinant! En 2018, j’ai eu l’occasion de rencontrer une personne membre de Parkinson Montréal-Laval qui m’a invitée aux groupes de pratique vocale qu’elle organisait pour et avec d’autres personnes vivant avec la maladie. Cette rencontre m’a sensibilisée aux difficultés vocales vécues par ces personnes et le manque d’outils disponibles et accessibles pour que celles-ci puissent agir sur leur voix. Depuis, je suis engagée auprès des associations pour les personnes avec la maladie de Parkinson et j’oriente mes recherches pour développer des outils et des ressources en voix pour leurs membres.
Pourquoi est-il essentiel pour les personnes vivant avec la maladie de Parkinson de travailler leur voix?
Ingrid : la maladie de Parkinson atteint le geste vocal et modifie la qualité de la voix. La voix peut devenir plus faible, plus fragile, instable, craquelée ou brisée, saccadée, tremblante, etc. Les mots peuvent être plus difficiles à articuler et on se fait moins bien comprendre. La voix est produite par un ensemble de muscles qui s’activent ensemble dans un mouvement rapide qui nécessite une coordination fine et précise. Avec l’âge, et d’autant plus avec la maladie de Parkinson, ce geste précis et compliqué devient plus difficile à programmer et à effectuer. Les changements dans la voix peuvent impliquer qu’on ait du mal à se reconnaître dans ce « visage sonore » qui ne nous ressemble plus et les gens autour de nous n’arrivent plus à nous comprendre aussi bien qu’avant. Cela entraîne des bris de communication et peut faire perdre le goût de parler.
Mais en parlant moins, on manque des moments pour entraîner ce geste et ces muscles de la voix. On peut alors tomber dans une spirale négative où la voix se détériore plus rapidement. Comme pour nos autres muscles et mouvements, c’est important de travailler notre voix quotidiennement, de nous assurer de faire une « promenade vocale » au moins tous les jours! Une promenade vocale ça peut être le fait de chanter pendant 15 minutes, de lire un long texte à voix haute, de faire une marche en discutant avec une autre personne, de participer à un groupe de pratique vocale ou une chorale par exemple. Pour un entraînement spécifique et à visée thérapeutique, il est recommandé de consulter un.e orthophoniste qui pourra vous proposer un programme individualisé.
En avril nous #FleurissonsLEspoir, quels conseils pourriez-vous donner aux personnes qui sont touchées par cette maladie?
Ingrid : osez! Osez faire entendre votre voix! Soyez fièr.e.s de ce qu’elle est et des liens qu’elle vous permet de tisser. Ne la jugez pas durement, choyez-là, prenez en soin comme vous pouvez! Repensez à tout ce qu’elle vous a permis de faire depuis le début de votre vie : faire entendre le nourrisson que vous étiez lorsqu’il avait faim ou besoin de réconfort, les éclats de rire qui ont résonné et réjoui vos ami.e.s, les mots d’amour que vous avez pu dire à vos proches, la colère qu’elle vous a permis d’exprimer, le réconfort qu’elle vous a aidé.e à apporter à un être aimé.
Un petit mot pour la fin?
Ingrid : votre voix est précieuse, belle, et importante, dans toutes ses formes! Les jours où elle fonctionne comme vous le voulez, et les jours où elle semble faire grève, elle mérite toujours d’être entendue et respectée!
Retrouvez les étudiant.e.s d’Ingrid Verduyckt tous les vendredis à 16h pour l’atelier Pratique ta voix.